Vingt et unième Juin
Quelqu’un (Pierre Tévanian, philosophe et essayiste dont je n’ai jamais entendu parler) dit dans le documentaire « elle venait d’ailleurs … elle donne l’impression de quelques chose de moins bourgeois ». Et puis d’autres disent qu’en fait, c’était même pas une actrice, qu’elle faisait un peu ça par défaut, comme Stévenin qui dit qu’il n’avait même pas eu l’idée de devenir acteur. C’est elle qui lui dit « Viens donc là jouer ce rôle ».
Un autre comédien parle d’un mystère intérieur. Le mystère intérieur de Juliet Berto.
Merci à Claude E. pour cette pépite!
Alors voilà, j’avais 20 ans. Il faut des idoles, il faut des reines de sables et des princesses intouchables, des inaccessibles qui nous renverraient à notre quotidien banlieusard avec des étoiles dans le yeux. Quelques jolies femmes semblant si libres, si délicieusement décalées, Christine Boisson, Marie Hélène Breillat et Dominique Laffin. Décalées de je ne sais quoi, en fait, mais restées dans ma mémoire comme des balises de ma jeunesse. Je pouvais bien être amoureux de telles actrices, puisque déjà je l’étais de bien des jeunes filles que je croisais autour du lycée de mecs dans lequel j’étais. Mes études secondaires furent d’ailleurs très médiocres, tant mon attention et mon énergie étaient tournées vers la porte du cour d’en face, Lycée Racine… que des filles. J’étais un grand amoureux au cœur d’artichaut, un sourire m’enchantait, un regard m’éblouissait. Ma patience était sans limite pour des rendez-vous qui n’avaient pas lieu, et pour des certitudes qui s’évanouissaient et se perdaient dans mes doutes immédiats. J’avais 20 ans, illusion, merveilleuses illusions, car chaque matin la rencontre serait bien sûr pour aujourd’hui.
Juliet Berto, elle a une place à part dans mon panthéon à deux balles. Pas pour ses films, sa carrière, pas parce qu’elle a joué pour Godard, non, rien de tout ça. Pour sa moue, pour sa bouche, pour la chair de ses lèvres qui étaient comme l’épaisseur de tout son corps. Tout un corps au service d’un visage, avec toujours sur cette bouche comme un tourment éternel. Et puis, et puis, ne le répétez pas, mais j’ai rencontré une femme qui lui ressemblait, mais je ne le lui ai jamais dit.
Saurez-vous mettre le nom sur chaque portrait?
Bonne nuit, lectrices, lecteurs.